Archives du séminaire Attachements – Pragmatisme et Sciences Sociales (2008-2017)

Le séminaire « Attachements » s’est tenu au CSI sous la direction d’Antoine Hennion[1], prenant en 2008 la suite du séminaire « Aimer la musique » (1997-2008). Conduit avec J.-M. Fauquet, G. Teil, puis J.-L. Tornatore, en collaboration avec l’ÉNS, l’ÉHÉSS puis Paris III-Sorbonne nouvelle, il a d’abord porté sur la sociologie du goût et les pratiques amateurs. Au delà du cas de la musique, le propos s’est élargi à des objets, des terrains ou des pratiques variés, pour s’intéresser aux liens que nous tissons avec les choses, et inversement à la façon dont elles nous tiennent.

À partir de la discussion de travaux et recherches, classiques ou récents, menés par les participants ou par d’autres, le séminaire porte sur les méthodes et les formes nouvelles de l’enquête en sciences sociales, vue comme une activité partagée avec les acteurs, et sur les révisions théoriques que réclame une telle attention renouvelée à ce qui compte pour les personnes, à travers les façons dont elles-mêmes entretiennent, approfondissent, transforment ou rompent leurs attachements.

Ces questions ont croisé un intérêt croissant du groupe pour le pragmatisme et les débats que ce courant peu unifié et mal connu a suscités en sciences sociales, à travers des thèmes comme le rôle des objets, les compétences des acteurs, l’expérience, ou le refus de postures surplombantes expliquant le comportement des intéressés par des causes sociales. Dans une démarche d’inspiration pragmatiste, l’accent est mis sur l’engagement du chercheur dans un monde à faire, et sur la pluralité, la fragilité et l’incertitude des objets, des réalités, des pratiques à faire émerger.

L’idée d’une fragilité des objets et des êtres ne vise pas seulement les problèmes sociaux au sens courant du mot, même si beaucoup d’enquêtes de participants portent sur ces questions (aide aux personnes vulnérables, soins palliatifs, accompagnement des SDF ; font en particulier partie du groupe les fondatrices de Dingdongdong, association de « co-production de savoir » sur la maladie de Huntington : <http://dingdingdong.org/>).

L’ouverture, l’incertitude, la fragilité des objets se retrouvent autant dans les autres enquêtes, portant sur les projets techniques ou l’innovation (nanotechnologies, architecture du Web), la formation des marchés (bio, énergie), les expériences esthétiques et corporelles (musique, danse), la recherche d’autres formes de vie et d’engagement (squats, travail sur l’« habiter », soutien aux travailleuses du sexe), ou l’accueil des migrants. Suite à un séjour commun d’une dizaine de jours en juin 2013 à l’IKKM à Weimar, où Antoine Hennion était invité pendant le printemps 2013, l’idée de rédiger un ouvrage collectif à partir de nos discussions croisées sur les enquêtes de chacun a pris corps. Depuis septembre 2013, le séminaire fonctionne sur un mode différent et n’est plus ouvert à tous. Il réunit une vingtaine de chercheurs d’âges, de disciplines et de statuts variés, volontaires pour participer à ce projet.

Suite à diverses journées et activités, notamment un séminaire de deux jours les 29-30 octobre 2014 avec des invités extérieurs et le dépôt de projets européens, et le dépôt d’un projet européen sur les attachements, l’idée est de nous donner les conditions favorables à l’écriture et la mise en forme de l’ouvrage commun, et plus largement à la relance d’un travail collectif sur ces questions. Si le projet est accepté, le séminaire Attachements reprendra selon de nouvelles modalités à l’automne 2018.

[1] « Vous avez dit attachements ?… », in Débordements. Mélanges en l’honneur de Michel Callon, M. Akrich, Y. Barthe, F. Muniesa, Ph. Mustar éds., Paris: Presses de l’École des Mines, 2010: 179-190.

« Enquêter sur nos attachements. Comment hériter de William James ? », SociologieS [en ligne], « Pragmatisme et sciences sociales », D. Céfaï et al. dir., 2015 http://sociologies.revues.org/4953

Courriel : antoine.hennion@mines-paristech.fr