Journée « Low-tech, maintenance, limites : comment repenser le numérique et ses impacts environnementaux »



Journée « Low-tech, maintenance, limites :

comment repenser le numérique

et ses impacts environnementaux »



mercredi 20 septembre 2023

à Mines Paris – PSL, 60 boulevard Saint-Michel, Paris

salle V 106 B


Organisation

Journée gratuite sur inscription, dans la limite des places disponibles. Merci de vous inscrire ici.

Événement organisé dans le cadre du projet ALDIWO (Anti-Limits in the Digital World) (synthèse du projet ci-après). Ce projet a obtenu le soutien financier du CNRS à travers les programmes interdisciplinaires de la MIT.

En français, pas de visioconférence.

Organisateur.rice : Clément Marquet (CSI, Mines Paris – PSL, i3) et Florence Maraninchi (Verimag, Grenoble INP – UGA)





Descriptif de la journée

Les sciences du numérique et le développement technologique sont dominées par un ensemble de mots d’ordre incompatibles avec les enjeux de sobriété auxquels nous faisons face : course à la puissance de calcul et à la vitesse des échanges, accélération de l’obsolescence matérielle et logicielle, invisibilisation de la matérialité du dispositif technique (voir synthèse du projet ALDIWO ci-après). Lors de cette journée, nous proposons un échange interdisciplinaire pour explorer d’autres pistes de recherche vers un système technique plus soutenable – et éventuellement plus dénumérisé.

Pour cela, la journée s’organisera en deux temps : un premier temps sera consacré à des présentations de sociologie et des sciences et des techniques et de sciences informatique portant sur des modalités alternatives ou dévalorisées de se rapporter au développement technologique – qui ne constituent pas pour autant des solutions prêtes à l’emploi ! Un second temps prendra la forme d’ateliers visant à dessiner des perspectives de recherche interdisciplinaire pour explorer des futurs socio-technico-écologiques souhaitables et soutenables, en interrogeant ce que deviendrait « le numérique » si on lui réintroduisait des limites.

Matin – Présentations (9h30-12h15)

  • 9h15 – 9h30 : accueil
  • 9h30 – 9h40 : Introduction – Clément Marquet (CSI, Mines Paris – PSL, i3) 
  • 9h45 – 10h30 : Morgan Meyer (CSI, CNRS, i3) Low-techs et objets frontières
  • 10h30 – 11h15 : Jérôme Denis (CSI, Mines Paris – PSL, i3) et David Pontille (CSI, CNRS, i3) Maintenance et attention à la fragilité

Pause

  • 11h30 – 12h15 : Florence Maraninchi (Verimag, Grenoble INP – UGA) *Contraintes, limites, optimisation : quelques exemples vus de  l’intérieur de l’informatique* 

Repas 12h15-14h

Après-midi – Ateliers (14h-17h)

Objectif : faire émerger des questions de recherche pluridisciplinaires

Format des ateliers à venir


Argumentaire du projet ALDIWO (Anti-Limits in the Digital World)

Les impacts environnementaux du numérique sont étudiés en recherche sous deux angles principaux : (1) les approches dites “Green IT” s’attaquent à l’optimisation de consommation électrique des équipements numériques en phase d’usage ; (2) les approches dites “Green-by-IT” ont l’ambition de réduire les impacts environnementaux de secteurs autres que le numérique, grâce au numérique.

Ces directions actuelles ne suffisent pas à couvrir l’ensemble des futurs envisageables quant à la place du numérique dans les bouleversements environnementaux actuels et à venir : (1) il n’y a pas d’exemple dans l’histoire du numérique, où les optimisations n’aient pas été accompagnées d’effets rebond massifs qui annulent les gains de ces optimisations ; (2) les gains théoriques espérés en proposant une nouvelle génération d’équipements numériques ne sont pas toujours au rendez-vous en pratique, en partie parce qu’une génération ne remplace pas la précédente, mais s’y ajoute, au moins pendant un certain temps ; (3) il est très difficile d’évaluer la potentielle réduction des impacts environnementaux des autres secteurs qu’on cherche à optimiser grâce au numérique. C’est un pari risqué de tout miser sur le fait que ces réductions seront suffisamment importantes pour autoriser le numérique à ne pas réduire ses propres impacts.

Pour que le numérique prenne sa part de la nécessaire réduction des impacts environnementaux globaux, il faut absolument envisager d’autres pistes que le green-IT et le green-by-IT. Il y a tout un pan de recherche potentielle en informatique qui constitue de la science non faite (*Undone Science* [1]). Ces sujets pourraient être étudiés depuis l’intérieur de la discipline informatique, en réexaminant systématiquement les choix de conception des systèmes anciens ou modernes, en cherchant des points d’optimisation potentielle encore non explorés, en évaluant la fragilité des infrastructures numériques vis-à-vis de contraintes drastiques imposées de l’extérieur, etc.

La réflexion cantonnée aux domaines de recherche du numérique nous semble cependant avoir deux défauts principaux : (a) elle est intrinsèquement limitée aux aspects pratiques et technologiques de la question, sans bien savoir par exemple comment tenir compte des usages, des effets rebond, des effets d’accélération de tous les autres secteurs, etc. ; (b) elle pâtit, même si c’est parfois inconscient, d’un cadre de réflexion qui voit les technologies numériques comme un (voire le seul) moyen d’ouvrir les futurs possibles, et toute idée de limitation comme relevant d’un pessimisme irréaliste ou d’un manque de confiance condamnable. Or dans son article “Predictions Without Futures” [2], S. Hong décrit parfaitement comment l’imaginaire du monde technologique, loin d’ouvrir les futurs, les referme complètement.

Dans ce projet, nous proposons donc d’explorer la notion de « limite » dans un cadre pluridisciplinaire, afin de dessiner des pistes pour un programme de recherche prenant au sérieux le projet d’une sobriété numérique.

[1] S. Frickel, S. Gibbon, J. Howard, J. Kempner, G. Ottinger, and D. J. Hess, “Undone Science: Charting Social Movement and Civil Society Challenges to Research Agenda Setting,” Science, Technology, & Human Values, vol. 35, no. 4, pp. 444–473, Jul. 2010, doi: 10.1177/0162243909345836.

[2] S. Hong, “Predictions Without Futures,” History and Theory, vol. 61, no. 3, pp. 371–390, 2022, doi: 10.1111/hith.12269.