Fabian Muniesa
L’Enquête sur les modes d’existence est un livre, mais c’est aussi d’autres choses : c’est un long projet intellectuel, bien évidemment, mais c’est aussi un lieu d’exercice. Une première lecture collective eu lieu en juin 2007, à Cerisy, lors d’un colloque qui portait très bien son nom : « Exercices de métaphysique empirique ». C’était un prolongement de ce qui se passait déjà dans l’atelier de Bruno Latour, et qui correspondait bien à cette devise : exercer quelque chose qui s’apparentait, d’une manière ou d’une autre, à de la métaphysique, mais à une métaphysique qu’il convenait d’appeler, étrangement, empirique. Qu’est-ce que c’est cette métaphysique ? Cette métaphysique, qu’il faudrait exercer, d’une manière empirique, mais tout en veillant à ce qu’elle demeure métaphysique ? C’est aussi une interrogation sur la place de Bruno Latour dans l’histoire philosophique des idées philosophiques, sur ce qu’il est en tant que métaphysicien. On peut commencer à répondre à cette interrogation comme il l’aurait sans doute fait lui-même. Non pas en arguant que l’exercice de métaphysique empirique était une rupture révolutionnaire vis-à-vis d’une tradition d’inflation théorique étrangère à une expérience des concepts. Mais en disant, au contraire, que la métaphysique a toujours été, depuis le début, malgré les inévitables incantations purificatrices, une sale affaire d’exercice empirique. Depuis le début : depuis l’invention de la métaphysique, depuis Parménide.
Fabian Muniesa est directeur de recherche à Mines Paris-PSL et membre du CSI. Initialement formé à la sociologie, ses domaines d’expertise incluent la sociologie des sciences et des techniques, l’anthropologie économique et les sciences de l’organisation. Ses centres d’intérêts et projets de recherche actuels incluent : la sociologie de la finance, l’anthropologie du capitalisme, l’histoire des méthodes expérimentales en sciences sociales, la pragmatique de l’organisation et la politique de l’innovation.
Intervenants de la Session 2 : Après une lecture de l’Enquête sur les modes d’existence